Résumé en cours d'écriture.
« Enialis ! Mon amour ! s'écria Ahuor en arrivant sur les quais de la cité où l'attendait le marchand.
- Ahuor ! »
Avant même que le bateau ne soit amarré, Enialis s'élança et grimpa à bord, sautant par dessus le bastingage avec une habileté que ne lui connaissait pas les cinq compagnons. Il s'approcha de sa promise et la prit dans ses bras dans un geste de tendresse qui la fit fondre en larme.
« Oh Enialis, sanglotait-elle, j'ai cru que …
- Ton épreuve est terminée ma belle, chuchota le marchand en caressant ses long cheveux blonds. Nous sommes ensemble à présent. Pour toujours. »
La scène était émouvante, aussi personne ne prit l'initiative d'y mettre fin.
Après quelques minutes, Ahuor se redressa un petit peu et essuya son visage.
« Tu devrais aller te reposer, dit Enialis.
- Tu as raison, ami de mes jours, répondit-elle avant de se tourner vers le groupe de héros. Je ne saurai vous remercier pour ce que vous avez fait pour moi. Je suis votre obligé pour le reste de ma vie car c'est à vous que je la dois. »
La belle elfe se leva et, accompagné de quelques serviteurs d'Enialis, débarqua du navire avant de se diriger vers celui du commerçant.
« Merci pour tout, mais je préfèrerai ne pas m'éterniser sur les docks, si vous voyez ce que je veux dire, intervint Sjendael qui avait retrouvé sa nonchalance habituelle après s'être reposé pendant le voyage. Et puis, si vous avez besoin de moi à l'avenir, je serai là, ajouta-t-il avec un peu plus solennel.
- C'est bon à savoir, répondit Akan avec un sourire.
- C'est clair ! ajouta Gurda. C'était pas de la rigolade ton nuage ! C'est plus vicelard qu'un bon coup de marteau mais on peut pas dire que c'est pas efficace.
- Bien résumé ! conclut le demi-elfe avec un sourire. À la prochaine fois, chers amis. »
Il sauta sur le quais en prononçant un mot de puissance et tomba au ralenti jusqu'à toucher délicatement le sol. Après un dernier signe de main, il disparut dans les ombres de la nuit.
« Me ferez-vous l'honneur de me rejoindre dans mon bureau ?
- Bien entendu, seigneur Melonangol, répondit Aldéir.
- Enialis. Après ce que vous avez fait pour moi, je vous suis à jamais redevable.
- Ne vous sentez pas … commença Aldéir.
- Vous m'avez rendu ma promise en vie alors même que rien ne vous y obligeait, l'interrompit Enialis. Vous avez fait plus pour moi que ma propre famille. À partir d'aujourd'hui et pour le reste de ma vie, vous pourrez compter sur mon aide. »
Le commerçant avait parlé avec tant de ferveur qu'aucun des cinq héros n'osa le contredire. Après quelques secondes dans un silence gêné, Gurda demanda.
« Tu as de quoi manger dans ton bureau ? »
La petite compagnie éclata de rire et tous se dirigèrent vers le navire du marchand.
***
« C'est donc ce disque de bronze qui a fait sombrer mes navires ? demanda Enialis après que Ginger lui eut conté le récit de leurs aventures.
- En tout cas c'est notre théorie, répondit Akan. Les courants autour de l'île semble ramener la majeur partie des décombres sur l'une des plages de l'île.
- Et certain truc sont encore en bon état, compléta Gurda. Regarde cette cape ! continua-t-elle en montrant la cape elfique qu'elle portait. On l'a trouvé sur des rochers, carrément dans l'eau.
- Effectivement elle a gardé toutes ses propriétés, remarqua Enialis en riant.
- C'est une de vos marchandises ? réalisa Ginger. Gurda va vous la rendre, nous ne voulions pas vous voler.
- Calmez-vous dame Ginger. C'est effectivement un des objets que transportait mes navires mais je vous en fait cadeau.
- Merci. Je ne manquerai pas de chanter ta générosité ! »
Pater se tenait à l'écart de la discussion, occupé à observer le champignon qu'il avait ramassé.
« Tout va bien ? demanda Akan. Tu as l'air pensif.
- C'est en effet le cas, lui répondit le druide. J'ai beaucoup étudié les espèces de champignons mais celui-ci ne ressemble à rien de ce que j'ai pu voir et c'est à partir de ces champignons que Skalafaar extrait ses poisons. Si seulement j'arrivais à comprendre les mécanisme mis en jeu par cette espèce, je devrais pouvoir mettre au point un remède…
- Je comprends. Peut-être que sir Peror pourrait te mettre à disposition un laboratoire et quelques plantes du Bosquet pour test expériences.
- Mais oui ! s'exclama Pater avec force, faisant taire toutes les conversations. Le Bosquet. Il faut que j'aille voir son protecteur, il pourra surement m'aider !
- Sire Peror ? demanda Akan un peu perdu.
- Non non. Il représente les sages mais ce n'est pas lui le protecteur du Bosquet. Il faut que je trouve maître Keren.
- Je crois qu'il se trouve actuellement au Bosquet, intervint Enialis. Il doit repartir demain matin il me semble.
- Alors je n'ai que peu de temps devant moi ! dit Pater en se levant d'un bond. Il faut que j'aille le trouver maintenant. Merci de votre hospitalité Enialis mais je dois vous laisser. Je vous retrouverai plus tard, ajouta-t-il à l'attention de ses amis.
- Maintenant ? demanda Aldéir. Mais le soleil va se lever dans quelques heures !
- La nuit des uns est le jour des autres dit Pater avec un sourire avant de ranger la fiole dans une de ses sacoches. »
Le tieffelin ferma les yeux et commença à changer de forme. En quelques instants, c'est un loup au pelage de jais et aux yeux rouges qui se trouvait devant eux. Il s'élança par l'une des fenêtres du bureau et se réceptionna sans un bruit sur le quai avant de partir en direction du Bosquet, aussi discret qu'une ombre.
« Votre groupe est définitivement peu commun, commenta Enialis. Vous devriez faire attention à vous.
- Comment ça demanda Ginger.
- Si vos théories sont exactes, ce dont je ne doute pas le moins du monde, alors vous avez interféré avec les plans des dockers. Il est possible qu'ils tentent quelque chose contre vous même dans la Cité. Et vous êtes facilement repérable.
- C'est effectivement un risque, approuva Aldéir. Nous ferons attention.
- Et puis si ils viennent nous chercher des noises, ils vont me trouver, conclut Gurda en posant la main sur le manche de sa hache.
- Il faudrait prévenir les gens, dit Ginger. Leur dire que les dockers sont dangereux.
- C'est en effet la meilleur chose à faire, approuva Enialis. J'enverrai dès demain une missive à Tych Tai Mogh pour prévenir ma famille du danger que représente ce disque de bronze.
- J'ai également un paquet à transmettre à ma famille, expliqua Aldéir.
- N'en dite pas plus. Je me chargerai de son acheminement.
- Merci Enialis. Il s'agit de mon ancienne armure d'écaille et d'une missive qui doit être transmise à mon père, le seigneur Lylandec Verteflammes, au plus vite.
- Très bien.
- Il faut aussi prévenir le Conseil, ajouta Ginger.
- Je suis d'accord, dit Akan, mais cela risque d'être plus délicat. Nous ne pouvons pas révéler la vrai raison de notre voyage sans exposer Enialis et cela ne doit pas arriver.
- Qu'importe la raison de notre présence sur l'île ? demanda Ginger. Cela ne change rien ce que nous avons vu.
- C'est vrai mais nous n'avons aussi aucune preuve si ce n'est notre témoignage, répondit Aldéir. Nous ne devons donc pas leur laisser la moindre chance de douter de nos paroles.
- D'autant que la guilde des dockers doit certainement avoir des alliés au Conseil, ajouta Akan sombrement.
- Politique, cracha Gurda. Rien n'est jamais simple.
- Et si tu étais celui qui demandait une audience au roi ? demanda Ginger à Enialis. Tu aurai très bien pu te trouver en mer et voir le disque. Avec les accords actuels, je suis sûre qu'il t'écouteras. Tu pourrais le mettre en garde contre le disque, sans forcément mentionner les dockers et demander à ce qu'il soit détruit au plus vite.
- Ce n'est pas une mauvaise idée, répondit le marchand. Je verrai si je peux obtenir une audience avec le roi demain.
- Parfait ! s'exclama Ginger avec un grand sourire qui se transforma en bâillement.
- Puis-je vous offrir un lieu où vous reposer ? demanda Enialis.
- C'est très généreux de votre part, dit Akan. Avec plaisir.
- La chose est entendu alors. Je vais vous laisser vous reposer. Considérez ce navire comme votre foyer pendant aussi longtemps que vous le souhaitez. Je vous souhaite une bonne nuit, mes amis. »
Tous le remercièrent et suivirent un serviteur qui les mena vers des cabines spacieuses où les attendaient de grands lits. Le sommeil ne fut pas long à venir.
***
Les quatres amis se levèrent quelques heures après le lever du soleil et se réunirent sur le pont. Ils décidèrent d'aller se restaurer dans l'auberge du port, ne souhaitant pas abuser de l'hospitalité d'Enialis. Le petit-déjeuner qu'ils commandèrent était copieux : pain, sardine, fruit, oeuf et une espèce de gruaux salé à base d'avoine. Tous avaient récupéré de leur éprouvant voyage et c'est dans la bonne humeur qu'ils partageait ce repas.
« Dame Gurda ? »
Le petit groupe se tourna vers le jeune homme qui avait parlé. Il ne devait pas avoir plus de douze ans, ne portait pas d'arme et était vêtu d'habits simples mais propres.
« Je suis pas une dame, petit gars, répondit Gurda en riant.
- Euh je suis désolé, ma dame. Euh je veux dire …
- Juste Gurda, lui indiqua-t-elle, mettant fin à son supplice.
- D'accord da… Gurda, répondit-il gêné. Je suis au service du seigneur Ulfgar Dartrek. Il vous cherche depuis hier et souhaiterait vous voir de toute urgence.
- Ah bon ? Et bien si il veux me voir il peut venir. Il reste une place à la table. Je lui paierai même une bière.
- Je ne pense pas que mon maître sera disposé à vous rejoindre. Il m'a demandé de vous mener à lui. Il dit que c'est important, quelque chose à propos de votre clan. »
Le sourire de Gurda disparut instantanément et son regard se fixa sur le jeune garçon.
« Mon clan ? Tu es sûr ? Il y a un problème ?
- Oui c'est ce qu'il m'a dit. Mais je n'en sais pas plus, je suis désolé.
- Oú est ton maître ?
- Chez lui. Je peux vous y emmener si vous voulez.
- Allons y alors, dit la naine en se levant.
- On peut t'accompagner ? demanda Aldéir.
- Allez ! répondit la naine. »
Toute trace de son humeur joviale avait disparu, remplacer par un air grave.
Le jeune garçon les mena à travers les rues de la ville jusqu'au quartier des nobles. Aldéir était sur ses gardes, observant chaque coin d'ombre à la recherche d'un éventuel danger. Tous ne purent s'empêcher de remarquer que la cité avait changé. Les banderoles de la course des trois couronnes avaient disparues et ils croisèrent de nombreux groupes de quatre ou cinq chevaliers en patrouille. On demandait aux marchands de ranger leurs étals, les estrades étaient démontées et les attroupements dispersés : on rendait la cité praticable en prévision de la guerre.
Le jeune page les mena jusqu'à une petite bâtisse à l'architecture inhabituelle. La demeure du seigneur nain était un regroupement de différents matériaux, astucieusement assemblés : des poutres apparentes en bois et en fer ciselé, des murs de pierres finement ouvragées, des vitraux colorés … Malgré la petite taille de la maison, il ne faisait aucun doute qu'elle valait une fortune.
« T'en a mis du temps bordel ! s'exclama Ulfgar qui venait d'ouvrir la porte d'entrée. Bienvenue à vous Gurda ! Bienvenu a vous tous.
- Je suis désolé maître Ulfgar, j'ai mis du temps à la trouver. Elle était dans la taverne du port.
- Elle était dans une taverne et t'as mis du temps à la trouver ? Et bah t'es pas le plus futé toi ! Enfin c'est pas grave. Ce qui compte c'est qu'elle soit là.
- Ton gars a parlé de mon clan, intervint Gurda.
- Oui oui. On a retrouvé un jeune de ton clan à quatre ou cinq lieux d'ici. Mort.
- Tu es sûr que c'est un membre de mon clan ? C'est une sacrée trotte depuis le village.
- Oui certain. Je commerce souvent avec les tiens. C'est un petit gars que j'avais déjà vu. Un messager.
- Tu connais son nom ?
- Non pas du tout. En tout cas, je me suis arrangé avec les Sages pour que le corps soit pas brûlé. Au cas où vous en ayez besoin pour des rites à vous.
- Merci.
- Mais je t'en prie, c'est normal. T'es le seul membre du clan du Hêtre dans le coin alors je savais pas bien vers qui me tourner. Tu te rappelles les convois qui arrivait pas dont j'ai parlé au conseil ? Ils venaient avec le petit normalement.
- C'était des convois de quoi ? demanda Aldéir.
- De minerai.
- Le minerai ? demanda Gurda.
- Ouais, répondit Ulfgar.
- Je vois, souffla la naine avec un sérieux que ne lui connaissait pas ses amis.
- Toi et tes compagnons, vous voulez voir le corps du petit ?
- Oui, répondit elle avec une étincelle de colère dans le regard.
- Il est dans une crypte du bosquet. Je vais vous y conduire. »
Le seigneur nain ne mit pas très longtemps à se préparer. Il les mena jusqu'au Bosquet d'un pas rapide et sans un mot.
***
La crypte était une petite construction de pierre. Ulfgar mena les quatres amis au sous sol, dans une large pièce où il faisait froid. Deux tables sur lesquels devait se trouver des corps étaient recouvertes d'un draps blanc.
« Il portait quelque chose sur lui ? demanda Gurda.
- Non rien de particulier. Vous pouvez regardez vous même si vous voulez, on a pas touché au corps.
- Les deux étaient ensembles ? demanda Aldéir.
- Quoi ? Ah ça ! Non pas du tout. Le grand gaillard à droite c'est un tieffelin qu'on a retrouvé ce matin. Un barde apparemment.
- Un barde ? demanda Ginger avec intérêt. Je peux le voir ?
- Euh oui j'imagine répondit Ulfgar visiblement décontenancé par la demande de la gnome. »
Ginger s'approche de la table qu'avait indiqué Ulfgar et découvrit le cadavre.
« C'est le tieffelin avec qui j'ai joué aux enfers ! s'exclama Ginger.
- C'est là bas qu'on l'a retrouvé. Personne l'a réclamé depuis. On connaît même pas son nom.
- Jlokth, murmura Ginger avec tristesse.
- Je peux regarder ? demanda Aldéir.
- Oui oui bien sûr. Après tout vous êtes les héros de la Cité maintenant. »
L'elfe s'approcha et parcourra méthodiquement les possessions du barde. Rien ne sortait de l'ordinaire : quelques parchemins où était écrit certaines de ses compositions, une masse, sa bourse, son luth et ses vêtements. Aldéir et Ginger étudièrent ensuite le corps avec attention. Il avait le visage déformé par la douleur et présentait des traces de brûlures sur les lèvres et dans la gorge, comme si on lui avait fait ingérer de l'acide Ginger remarqua également la présence de multiples coupures, presqu'invisibles, sur la totalité de son corps. Lorsqu'elle les indiqua à Aldéir, celui-ci grimaça.
« Tout indique qu'il a été torturé. Pendant plusieurs heures. C'est comme si son assaillant lui avait même prodigué des soins pour le maintenir en vie plus longtemps. C'est l'acide qui a mis fin à son supplice. Une fin atroce.
- Tu as une idée de ce qui pourrait faire ce genre de coupure ?
- Pas la moindre … »
Pendant ce temps, Akan et Gurda s'était penché sur le corps du jeune nain. Il ne faisait aucun doute qu'il appartenait au clan du Hêtre. Il avait le torse tatoué du même symbole que Gurda arborait sur son cou. Son corps portait les traces de nombreuses blessures : son visage tuméfié avait enflé tant il était abimé, l'un de ses bras était brisé, tout comme plusieurs de ses côtes. Akan souleva délicatement le corps et remarqua également la présence de griffures de hyènes dans son dos. Gurda approcha ses mains de la bouche ouverte du défunt et parvint à extraire un étrange matériau coincé entre ses dents.
Il s'agissait d'un morceau d'ongle mais dont la taille était impressionnante.
Le visage de Gurda se décomposa.
« Où sont ses affaires ? demanda Akan.
- Tout est là, répondit Ulfgar.
- Vous êtes sûr ? Il n'a même pas de chaussures ! Pas de rations, pas d'armure, pas de gourde. Il faut au moins deux jours pour rejoindre le village du clan.
- Il a croisé la route d'un géant, intervint Gurda.
- Un géant ? réagit Akan.
- Oui. Aucun doute la dessus. Regarde la taille du morceau d'ongle qu'il avait coincé entre les dents. Mon clan combat les géants depuis des générations. Je sais ce que je dis.
- Ça vole les convois les géants ? demanda Ulfgar. Parce que là où on l'a retrouvé, il y avait aucune traces de mes chariots.
- De chariots de minerai ? demanda Gurda.
- Oui. Et pas qu'un peu.
- Quel est ce minerai dont vous parlez ? demanda Aldéir.
- C'est le minerai magique du clan du Hêtre, répondit Gurda. Il est particulièrement résistant et est utilisé pour forger des armes avec des propriétés magiques. Si il est fondu et forgé correctement, il peut même donner des armes toxiques.
- Ils le vendent qu'une fois par an et d'habitude c'est les Sages qui arrivent à l'acheter, ajouta Ulfgar. Mais cette année, avec la guerre, je me suis dit que ça pourrait être un bon investissement alors j'ai pris les devants et j'ai acheté tous les stocks.
- Vous voulez le mettre à disposition de la cité ? demanda Akan.
- Je peux leur en vendre une partie bien sûr. Mais il me faut une nouvelle hache aussi.
- Je vois, ajouta Akan avec un certain mépris.
- Vous avez entendu parler de géants dans le coin récemment ? demanda Gurda.
- Des ettins ont été vus pas loin pendant la course apparemment. Mais bon, il y a des montagnes à côté, c'est pas étonnant qu'on y voit des géants non plus. C'est juste que d'habitude ils restent à distance de la cité.
- C'est beaucoup plus grave que ça, corrigea Gurda avec force. Les géants sont une menace très sérieuse. Et les légendes de mon clan ont très claires sur le fait qu'ils ne doivent jamais s'emparer du minerai.
- Et puis ce pauvre homme a des traces de griffures de hyènes, ajouta Akan. Tout cela ne me dit rien qui vaille. Si les gnolls et les géants travaillent de concert, il faut prévenir le conseil et vite.
- Ça je peux m'en charger, rétorqua Ulfgar. Si l'armée ennemi a des géants avec eux, il faut qu'on se prépare différemment. Je vais en parler au conseil.
- Peut-être que le clan du hêtre a des problèmes avec les gnolls du coups, remarqua Ginger.
- Possible oui, répondit Ulfgar.
- Nous devons aller rapidement voir ce qui se passe là bas, dit Gurda. Il était pas équipé pour le voyage donc il a dut partir dans la précipitation. Et puis ces marques ici, dit-elle en pointant des renfoncements bleuâtres dans les flancs du défunt, c'est l'œuvre d'un géant. Il a été broyé mais il a continué à courir.
- Et il est mort d'épuisement sur le chemin, termina Aldéir.
- Ça veut dire que le clan a peut-être été attaqué, dit Ginger. Ce brave nain a essayé de prévenir la cité jusqu'au bout.
- Il faut qu'on y aille et vite, conclut Gurda avec force.
- Je suis d'accord, dit Akan. Je pense parler au nom de tous en disant que nous allons t'accompagner.
- Bien sûr ! dit Ginger.
- Évidemment, renchérit Aldéir. Si les gnolls sont à l'origine de ça alors peut-être ton village a-t-il un rapport avec la prophétie, ajouta-t-il après quelques instants. Tous les villages attaqués gardait quelque chose. Est-ce le cas pour le village du clan du Hêtre ?
- La mine. Notre village est construit autour du grand Hêtre dont les racines abritent la mine. D'après les légendes, le village a été construit pour protéger l'arbre. C'est le rôle de notre champion.
- J'en ai entendu parler, dit Ginger. C'est un hêtre qui revient dans toutes les histoires, comme s'il était là à l'origine du monde.
- C'est ça, confirma Gurda. Mais vous aurez le temps de vous racontez des histoires sur le chemin. on a pas de temps à perdre. Moi j'y vais ! »
Gurda se dirigea ensuite d'un pas assuré vers l'escalier, bientôt suivi par le reste de ses compagnons. À la sortie du Bosquet, Ulfgar leur souhaita bonne chance et partit vers la salle du Conseil. Le reste du groupe, mené par Gurda, se mit en route pour le village du clan du Hêtre, au nord ouest de la Cité des Trois Couronnes.
***
Le voyage vers le village du clan du Hêtre se fit dans un silence pesant. Après moins d'une heure de marche, le groupe découvrit le lieu où le corps du nain avait été retrouvé. Comme ils s'y attendaient, ils ne trouvèrent aucune trace de lutte. Le pauvre nain était tout simplement mort d'épuisement et des suites de ses blessures. L'attaque avait eu lieu bien en amont.
Ils ne s'attardèrent donc pas et continuèrent leur route vers les montagnes. Après deux jours de voyage, Gurda leur indiqua qu'ils atteindraient bientôt le village. Son commentaire s'avéra rapidement inutile car tous purent constater qu'ils étaient proche de leur destination. Aucun bruit ne se faisait entendre dans les montagnes et l'air était chargé de menace. Instinctivement, ils avaient tous dégainés leurs armes et avançaient avec prudence. Ils ne tardèrent pas à sentir l'odeur pestilentielle de la mort. Gurda ne put retenir un cri de stupeur et de rage en découvrant le spectacle macabre qui l'attendait : le village avait été massacré. Des corps de nains gisaient à même le sol au côtés de ceux de géants, gnolls, ogres et hyènes. Ils s'approchèrent du centre du village et furent bientôt en vue du grand Hêtre dont les branches avaient étés chargés de cadavres mutilés de nains, pendus par les bras où les jambes. La naine s'élança vers le Hêtre tandis que ses amis observaient le reste du champ de bataille. Les corps des nains étaient mutilés et à moitié dévorés mais ils s'étaient vaillamment défendus. Pour un corps de nain, c'était presque dix créatures qui gisaient, vaincues, à proximité. Ils ne purent trouver aucun survivant sur le champ de bataille et Ginger ne put déceler le moindre son provenant de la mine effondrée.
Un murmure aux paroles incompréhensibles s'éleva des racines de l'arbre sacré et tous s'en approchèrent. Gurda en revanche entendait distinctement la voix du Champion qui l'appelait. Lui intimait de le rejoindre dans les racines.
La naine s'engagea donc sans un regard en arrière dans les racines de l'arbre, suivie de ses amis. Il s'agissait d'une sorte de terrier, comme creusé à même la terre et dans lequel seul Ginger et Gurda pouvait se tenir debout.
Les murmures s'interrompirent et le silence revint dans la caverne.
« Champion ! » cria Gurda de toutes ses forces sans obtenir d'autre réponse que l'échos de ses propres paroles.
Ils continuèrent d'avancer et finirent par émerger dans une large cavité à la végétation luxuriante. Tous réalisèrent en même temps que quelque chose avait changé, comme si ils avait émergé ailleurs : les proportions de la caverne ne coïncidaient pas avec ce qu'ils auraient du trouver, la lumière était différente, comme provenant de la végétation trop verte et de l'eau trop bleu qui suintait des parois et coulaient doucement dans un petit ruisseau.
Quatre stèles de pierre étaient couchées et à même le sol à leur pieds, quasi intégralement recouvert par la végétation. Une trace ensanglantée, en forme de main et de la taille de celle d'un nain ou d'un enfant, était présente sur l'une des parois.
« Je ressent de la magie tout autour de nous, dit Ginger. Je n'ai jamais ressenti quelque chose comme ça, c'est comme si l'air lui même était empli de magie. Vous sentez ?
- Non, pas du tout, dit Akan.
- J'ai l'impression de connaître cet endroit, sans vraiment le connaître, murmura Aldéir, pensant à haute voix. C'est comme si … j'étais chez moi. Mais que quelque chose clochait, comme l'envers du décor. »
Tous écoutèrent le jeune rôdeur mais nul ne réagit à ses étranges paroles.
Devant eux, il pouvait voir plusieurs ouvertures humides, nimbés de cette étrange lumière végétale, qui partaient en tout sens. Certain semblait continuer tout droit, tandis que d'autre s'enfonçait plus profondément sous terres ou au contraire remonter vers la surface. De larges toiles d'araignées étaient visibles dans la plupart des conduits, tissés par des insectes certainement beaucoup plus imposant que de simple araignées.
Un cercle était gravé dans le sol rocheux, sur lequel d'étranges symboles était à demi-visibles. Quatre renfoncement était creusé autour du cercle.
Après un examen attentif, Ginger constata que les symboles du cercle étaient assez semblables à ceux des stèles et que ces dernières devaient pouvoir être insérées dans les renfoncements du cercle. Elle n'avait cependant pas la moindre idée de la signification de tout ceci.
« Champion ! » cria à nouveau Gurda.
Des bruits se firent entendre presqu'instantanément en provenance des boyaux du fond de la grotte. La naine posa un doigt sur ses lèvres avant de raffermir sa prise sur le manche de sa hache.
« Ya un truc qui va pas, murmura la naine. On devrait se faire discret, les bruits qu'on vient d'entendre ne me disent rien qui vaillent.
- Ça y est ! s'exclama en chuchotant Ginger. J'ai compris ce qui me gênait depuis le début avec ce cercle et ces stèles. Ils sont camouflés derrière une illusion. Concentrez vous et vous devriez pouvoir passer outre. »
Ses amis mirent ses conseils en application et s'efforcèrent de résister à l'illusion. Lorsqu'ils rouvrirent les yeux, ils réalisèrent que la végétation ambiante n'était pas aussi dense qu'ils l'avaient crus : le cercle était parfaitement visible, tout comme les stèles, nullement abîmée. Seul Aldéir ne parvint pas à surmonter l'illusion, incapable de vider son esprit trop en alerte. Akan fit alors remarquer au reste du groupe la présence de trace de pas ensanglanté qui s'éloignait vers l'un des boyaux.
« Ça doit être le Champion, chuchota Gurda avec force. Il faut qu'on le retrouve !
- Et bien suivons les traces dans ce cas, répondit Akan. Mais restons prudent.
- Je suis d'accord, approuva Aldéir. Faite surtout attention aux toiles d'araignées. Elles servent de moyen d'alerte pour ces créatures. Il suffit d'en effleurer une pour révéler notre présence. »
Le petit groupe s'engagea alors sur la piste du nain, avançant prudemment dans le clair obscur de la caverne.
***
Après plus d'une vingtaine de minute de marche vigilante, le groupe de héros finit par perdre la trace du nain. Ils finirent par arriver à un nouvel embranchement. Devant eux, s'ouvrait trois passages. L'un était presque complètement parsemé de toiles d'araignée. Le second, au centre, semblait continuer tout droit mais la faible clarté bleuâtre ambiante ne permettait de voir plus loin que quelques mètres. Le dernier des trois conduits était éclairé par une lumière qui tirait vers le vert et contrastait avec le reste de la caverne, et menait plus profondément sous terre. Cette étrange lumière n'était pas généré par les parois où la végétation à la différence des autres amis semblait plutôt provenir du bout du conduit, comme diffusée par une sorte de lanterne. Intrigué, le groupe s'engagea dans le boyau et continua de s'enfoncer plus profondément sous terre. Ils finirent par déboucher sur un spectacle extraordinaire : le tunnel débouchait sur une petite plateforme rocheuse qui surplombait une large plaine de pierre dans laquelle flottait de petite lumière verte, comme des feux-follets. La voûte de la caverne était si haute qu'on aurait pu se croire à l'extérieur par une nuit sans lunes et sans étoiles. L'atmosphère étouffante, à la fois chaude et humide, ne laissait cependant aucun doute aux quatre compagnons quant au faits qu'ils se trouvaient sous terre.
Ginger laissa échapper un hoquet de surprise avant de chuchoter à ses camarades :
« Regardez là bas ! Vous avez vu cette créature ?
- Mettez vous à couvert, réagit immédiatement Aldéir. »
Tous étaient habitués à suivre les instincts des uns et des autres, aussi il se placèrent derrière l'un des nombreux piliers rocheux qui parsemait la caverne comme un seul homme.
Aldéir passa ses yeux de lynx et observa la créature indiquée par Ginger.
Il n'avait jamais rien vu de tel. On aurait dit une espèce d'amas d'énergie habillé d'un long manteau noir et portant un grand sceptre ouvragé. Elle se déplaçait au milieu des feux follets, drainant la lumière jusqu'à son visage d'énergie. Elle ne cessait jamais d'avancer, aspirant toujours plus d'énergie. La plupart des feux follets qu'elle drainait perdait en clarté mais certain s'éteignaient même complètement sous l'action de l'étrange créature.
Lorsqu'Aldéir fit part de son observation au reste de ses compagnons, Akan ferma les yeux et ouvrit son esprit au monde hostile qui l'entourait. Il cherchait à identifier ce que pouvait bien être cet étrange voleur de lumière mais la quantité de sensation qui l'assaillirent faillit lui faire perdre connaissance. Il pouvait ressentir à plus la présence d'une multitude de créature dangereuse tout autour de lui : il percevait des esprits de la nature aussi puissant et ancien que la pierres qui lui se manifestait comme des coups de tambour régulier qui résonnait en lui et des créatures à l'âme aussi noir plus noir que l'obsidienne dont il entendait le rire cruel. Il avait l'impression que son corps était en train de brûler tout en sentant un froid glacial le parcourir alors qu'il peinait à respirer, comme si il se noyait. Certaines des énergies qu'il pouvait ressentir était tellement étrange qu'il était incapable de les comprendre, comme issues d'un autre univers. Enfin, il pouvait percevoir avec force la présence de mort-vivants autour de lui, affront à la nature elle même, sous la forme d'une odeur de putréfaction si forte qu'il avait le coeur au bord des lèvres. Lorsqu'il ouvrit les yeux, le calme revint dans son esprit et il prit le temps de calmer les tremblements qui avait commencé à l'agiter.
« Je ne sais pas où nous sommes, commença-t-il doucement, mais nous ne sommes pas à notre place. Autour de nous, j'ai pu sentir la présence de forces dangereuses et innombrables.
- Quelle genre de force ? demanda Aldéir avec calme.
- Des fées je pense, des démons et des morts vivants. J'ai aussi ressenti des puissances élémentaires à l'œuvre et des âmes tellement étranges et aberrantes que je ne sais quoi penser.
- Ça va aller ? demanda Gurda en touchant le bras de son camarade.
- Oui ne t'inquiète pas. J'ai simplement été submergé par les énergies qui nous entourent.
- Bon tant mieux, dit-elle. On fait quoi maintenant ?
- Je suggère qu'on reste à distance, répondit Aldéir. On ne sait pas ce qu'est cette créature, ni si elle nous est hostile.
- En même temps, intervint Ginger, on ne sait pas vraiment où on est ni où a bien pu partir le Champion. On pourrait lui poser la question.
- Ce n'est pas très prudent, dit Akan doucement.
- La prudence c'est bien, rétorqua Gurda, mais on a pas vraiment d'autre solution. On a perdu la trace du Champion et on a pas croisé qui que ce soit d'autre dans ces maudites cavernes. Moi je dis, on y va et on lui pose la question. S'il nous attaque, on est quatre et il est tout seul. »
La naine avait une telle détermination dans les yeux qu'Aldéir et Akan ne la contredirent pas. Ils sortirent de derrière leur abris et amorcèrent leur descente vers la plaine, leur armes au fourreaux mais préparé à dégainer au moindre signe d'hostilité.
Lorsque la créature remarqua leur approche, elle s'immobilisa et abaissa son sceptre doucement. Le drain d'énergie cessa immédiatement et elle se tourna en direction des quatre compagnons.
Il n'avait pas de visage, seulement un amas d'énergie verdâtre qui ondulait doucement. Il leva l'un de ses bras et leur fit un signe de la main. Tous réalisèrent a cet instant que sa main étaient a l'envers, comme si ils ils observaient un reflet dans un miroir.
« Bonjour, dit Akan en primordial, la langue des élémentaires.
- Bonjour, lui répondit une voix grave dans ce même langage.
- Salutation, dit ensuite Aldéir en commun.
- Bonjour à vous aussi, lui répondit la créature avec une voix de femme. »
Intriguée, Ginger le salua en gnome et ce fut avec la voix d'un enfant qu'il répondit dans ce même langage. Aldéir demanda alors :
« Savez-vous où nous nous trouvons ?
- Voilà une étrange question. Vous êtes en Outreterre, répondit le voleur de lumière avec cette fois-ci une voix d'homme.
- On cherche un nain avec une grande hache, dit Gurda. Vous l'auriez pas vu ?
- Le Champion du clan du Hêtre je présume. Je l'ai effectivement aperçu un peu plus tôt. Il est parti en direction du lac. Je comprend donc qu vous n'êtes pas d'ici n'est-ce pas ?
- Non, en effet, répondit Akan.
- On vient du Hêtre, ajouta Gurda. Comme le Champion. Je suis moi même membre du clan.
- Je vois, le portail de l'arbre.
- Vous avez l'air de bien connaître la région, remarqua Ginger.
- En effet, je pourrais vous parler du portail du tigre, du grand lac ou encore de l'antre des araignées. Mais je préfère rester ici, dans la plaine désolée.
- Vous savez ce que sont ces espèces de lumières aussi ? demanda la gnome avec intérêt.
- Oui, bien entendu. Je m'en nourris. Mais je ne suis pas sûr d'avoir bien compris si vous êtes de notre monde où non. À quelle cour va votre allégeance ?
- On vous l'a dit, on vient du Hêtre, répondit Gurda.
- De derrière le Hêtre vous voulez dire ?
- Si vous voulez oui, dit Gurda. On est passé sous le Hêtre.
- Donc vous n'êtes pas de ce monde, conclut l' étrange créature.
- Mais que voulez-vous dire par là ? demanda Ginger. Nous sommes du même monde, il n'y a qu'un monde.
- Bien sûr que non. Surtout ici, vous n'avez qu'a regarder le sol, ajouta-t-il en riant avec la voix d'une petite fille. »
Il se déplaça de quelques mètres et commença à pointer le sol avec l'un des ses étrange doigts. Il glissait sur le sol sans un bruit et ses mouvements rappelaient ceux d'un chat.
Le groupe réalisa alors que ce qu'ils avait pris pour une plaine était en fait des ruines. Le sol était pavé et ils pouvaient distinguer ce qui devaient être le reste d'ancienne constructions de pierre.
« Vous voyez cette ancien artéfact ? Je pense que c'est un ancien astrolabe. Un instrument utilisé par une ancienne civilisation pour étudier l'univers, les différents mondes.
- Un astrolabe ? répéta Ginger avec admiration. ne manque-t-il pas un morceau ? comme un disque en bronze ?
- Je ne saurai pas vous dire, répondit le voleur de lumière, cet appareil doit avoir plusieurs millénaires.
- Vous connaissez le nom de cette ancienne civilisation ? demanda Aldéir.
- Non, il a été oublié depuis des lustres.
- Et le vôtre ? demanda Akan. Quel est votre nom ?
- Le mien ? demanda-t-il avec étonnement. Je l'ai perdu.
- Comment peut-on perdre son nom ? demanda Ginger avec surprise.
- Cela arrive tout simplement. Ainsi vont les choses en Féérie.
- En Féérie ? réagit Akan. N'avez-vous pas dit que nous étions en Outreterre ?
- Si. Nous sommes dans l'Outreterre en Féérie.
- Super, conclut Gurda. Vous avez dit que vous avez vu le Champion ? C'était quand ?
- Oui, il allait vers le grand lac. Je n'ai pas vraiment la notion du temps, si tant est qu'une telle chose ait le moindre sens ici. Il était à l'aube de sa vie lorsque je l'ai vu il me semble. Je peux vous mener au lac si vous voulez. À moins que vous ne préfériez vous rendre au portail du Tigre ?
- Non au lac, dit Gurda.
- À l'aube de sa vie ? répéta Akan à voix basse avec incompréhension.
- On a pas le temps de s'attarder sur ce qu'il dit, lui répondit Gurda en chuchotant. Si le Champion est parti vers le lac, alors c'est là bas qu'on va nous aussi. »
Le groupe suivit donc l'étrange créature dans un sombre boyau qui s'enfonçait un peu plus loin sous terre.
***
Le petit groupe marchait depuis presque dix minutes lorsque Ginger décida de jouer un petit peu de musique, cherchant à se montrer le plus amical possible avec leur étrange guide. Aldéir quant à lui cherchait toujours à en apprendre plus sur lui.
« Que faites vous dans la plaine ?
- Je me nourris.
- Oui vous l'avez déjà mentionné en effet. Je pensais plutôt à la raison de votre présence ici. Quel est votre but ?
- J'apprend. Et je deviens plus fort. Mais n'est-ce pas finalement le but de tout être ?
- Je ne saurai dire, répondit le rôdeur quelque peu décontenancé. Vous n'avez pas d'autres objectifs que de gagner en connaissance et en force ?
- Non. Cela a toujours été ma raison d'être, d'aussi loin que je me souvienne.
- Je vous prie d'excuser ma question mais .. quel âge avez-vous au juste ?
- Je ne saurai vous donner un chiffre exacte. Comme je vous l'ai dit, le temps est une notion complexe et je crains d'avoir perdu le compte de mes propres années.
- Je vois, répondit Aldéir qui s'attendait à ce type de réponse. Puis-je vous poser une autre question ?
- Bien sûr, répondit le voleur de lumière.
- La prophétie des quatres éléments et des quatres enfants vous évoque-t-elle quelque chose ?
- Je crains que non. Quel est elle ?
- Une ancienne fable de notre monde, répondit Akan, préférant couper court à cette conversation. Somme nous bientôt arrivés au lac ?
- Oui. Pour tout vous dire, vous voyez cette lumière bleutée plus loin ? C'est votre destination. Je vais à présent retourner d'où je viens, je préfère la plaine à cet endroit.
- Très bien, répondit Akan.
- Merci pour tout, dit Aldéir.
- Je vous en prie. Bon courage pour la suite de votre voyage. »
Après un dernier signe de son étrange main droite, la créature s'éloigna sans un bruit de sa démarche féline et disparut rapidement dans les ombres de la caverne.
Les quatres compagnons se trouvait dans un large passage dont les parois humides brillaient de cette étrange lumière bleue.
« Les gars, chuchota Gurda au reste de ses camarades, je crois que quelqu'un nous suit.
- Hostile ? demanda Akan qui avait toute confiance dans les intuitions de la naine.
- Non je crois pas. En tout cas je sens pas de danger particulier. Ça nous suit depuis un moment maintenant mais ça restait à distance tant que l'autre truc était là.
- Je l'entends aussi à présent, intervint Aldéir. Il s'approche. »
Moins d'une seconde après la remarque du rôdeur, un elfe d'une pâleur extraordinaire et aux long cheveux sombre surgit des ombres, comme entouré d'une douce brume grise. Il ne portait pour seul vêtement qu'une grande toge blanche qui laissait voir la majeure partie de son torse sur lequel brillait plusieurs tatouages et marques d'une douce lueur argentée. Une large sacoche était passée en bandoulière et on pouvait voir ce qui semblait être un grimoire dépasser de celle-ci. Il avançait doucement, les paumes tournées vers le groupe et sa dague accrochée à sa ceinture, comme pour indiquer des intentions pacifiques. Il s'arrêta à quelques mètres des quatres compagnons et fixa ses deux pupilles presque blanche sur eux.
« Vous faîtes beaucoup de bruit, chuchota-t-il en sylvain. Vous devriez être plus silencieux si vous souhaitez éviter les mauvaises rencontres.
- Entre notre naine et notre barde, je crains que ce soit là une tâche bien ardue, répondit Aldéir avec humour en s'efforçant de parler aussi bas que le mystérieux elfe.
- Je suis sérieux. Les araignées vous ont repérés un peu plus tôt et elles n'ont perdu votre trace que parce que vous avez voyagé avec le moissonneur. Vous devriez vraiment prendre garde à ne pas faire de bruit ici. Vous êtes Aldéir n'est-ce pas ?
- C'est exact, répondit le rôdeur sans parvenir à masquer sa surprise. Comment connaissez-vous mon nom ?
- Je vous suis depuis que vous avez posé le pied sur ces terres. J'étais moi même en train d'étudier les stèles de la porte du Hêtre lorsque j'ai entendu vos cris dans les galeries.
- Je vois. Puisque vous connaissez mon nom, pouvez-vous me donner le vôtre ?
- Je suis Olmith.
- Enchanté, répondit Aldéir. Voici …
- Ginger, Gurda et Akan le coupa Olmith calmement. Je vous ai entendu discuter entre vous.
- C'est exact, répondit Aldéir.
- D'ailleurs vous devriez dire à votre ami Akan qu'il ne devrait pas ouvrir son aura comme il l'a fait tout à l'heure. Si j'ai pu la ressentir avec autant de force, il est probable que d'autre ai pu la percevoir également. »
Aldéir transmit l'avertissement d'Olmith à Akan qui hocha la tête pour signifier sa compréhension.
« Vous ressemblez à un elfe et pourtant, sans savoir l'expliquer, j'ai l'impression que vous n'en êtes pas un. Seriez-vous un Eladrin ?
- C'est exact, répondit-il. Mais si ce sont mes tatouages qui vous ont mis sur cette voie, vous faites erreur, ajouta-t-il en remarquant les regards curieux du rôdeur.
- Que sont ils alors ?
- Un cadeau de mon patron, un des seigneurs de Féérie. Je suis sorcier.
- Je comprends.
- Demande lui s'il a vu le Champion, intervint Gurda en commun.
- Auriez-vous vu un autre nain emprunter le même chemin que nous, peu avant notre arrivée ?
- En effet mais il est passé par la porte du Hêtre hier. Je crains qu'il ne soit mort à l'heure qu'il est. Il a croisé la route des araignées. »
Aldéir transmit les funestes nouvelles à Gurda qui serra les dents pour contenir sa colère.
« Il est sûr de ça ? Il a vu le champion mourir ? Et sa hache ? Il sait où elle est ?
- Êtes vous sûr que le Champion est tombé face aux araignées ? Vous en avez été témoins ? demanda Aldeir.
- Malheureusement, sa mort ne fait pas le moindre doute. Vous m'en voyez désolé.
- Il portait une grande hache. Savez-vous ce qu'elle est devenue ?
- Je suppose qu'elle est encore dans l'antre des araignées. C'est un endroit très dangereux, je doute que quiconque ai put s'en emparer et repartir vivant. »
Le rôdeur elfe fit part de sa conversation avec Olmith au reste de ses compagnons. Ginger était très intéressée par son étude des stèles et demanda à Aldéir de l'interroger à ce sujet.
« Vous avez dit être en train d'étudier les stèles lorsque nous sommes arrivées ici.
- En effet. Je suis historien et je m'intéresse particulièrement aux inscriptions présentes sur ces stèles.
- Vous êtes parvenu à les traduire ?
- Non, la tâche est beaucoup plus complexe qu'elle n'y paraît. Je soupçonne celle-ci d'être en réalité un assemblage de plusieurs langages, exactement comme celle de la porte du Tigre.
- Voilà plusieurs fois que nous entendons parler de cette porte du Tigre. De quoi s'agit-il exactement ?
- C'est le nom que l'on donne à l'autre portail de la région. On l'appelle comme ça à cause de la grande statue sur laquelle il se trouve. Elle représente une grande créature, probablement un géant, qui tient une tête de tigre dans sa main. C'est sur cette tête de tigre que se trouve justement le portail et les inscriptions dont je vous parlais.
- Des portails ? demanda Aldéir surpris. N'est-ce pas là du domaine des légendes ?
- Peut-être pour certain mais leur existence ne fait pas l'ombre d'un doute en ce qui me concerne.
- Vous en avez déjà emprunté un ?
- Non jamais. À vrai dire je ne sais même pas comment les activer. J'emplois d'autre moyen pour voyager jusqu'à la surface.
- Vous n'êtes pas d'ici donc ?
- Tout dépend de ce que vous entendez par ici. Si vous vous référez à l'Outreterre alors non effectivement, je ne viens là que pour mes recherches. Cette terre était autrefois un grand planétarium, un endroit extraordinaire où les deux cours travaillaient ensemble pour découvrir les secret de l'univers. Mais aujourd'hui les choses sont bien différentes et le danger est omniprésent dans ces cavernes. C'est le domaine du mal, le domaine des drows.
- Certain des termes que vous employez me sont inconnus, expliqua Aldéir. Que sont ces drows dont vous parlez ? Et qu'en est-il des deux cours auxquels vous faites référence ?
- Les drows sont des membres de votre peuple qui ont sombré dans les ténèbres après avoir pactisé avec une puissance démoniaque. Cette maudite engeance n'existe pas dans votre monde ?
- Non, les elfes de notre monde ont vaincu les démons lors de la grande guerre. Je n'ai jamais entendu parler de traîtres qui aurait pactisé avec les puissances des ténèbres.
- Considérez-vous chanceux car les drows sont des créatures corrompues et très dangereuse. En ce qui concerne les deux cours, je parle de la cour d'été et de la cour d'hiver.
- Je crains que ces noms ne m'évoquent rien de plus.
- Vous devez vraiment venir d'un monde très étrange, murmura l'eladrin. La cour d'été est la cour qui règne aujourd'hui en Féérie. Elle représente la lumière et tout ce que la vie peut apporter de plus beau. La cour d'hiver est le camp du mal, du désespoir et du froid. Leurs âmes sont plus noires qu'une nuit sans lune et ils ne laissent qu'une terre aride et morne là où ils passent. Vous êtes sûr que cela ne vous évoque rien ?
- Le bien et le mal existent dans tous les mondes je le crains mais je ne connais rien qui ressemble à ce que vous me décrivez.
- Curieux.
- Nous sommes donc sur les terres de la cours d'hiver ?
- Non point, répondit l'Eladrin. Il y a longtemps que les cours ont abandonné cet endroit. Il ne reste plus que les démons et le roi des géants qui habitent ces terres. Ainsi que les drows bien sûr, qui en ont fait leur domaine.
- Il faut qu'on trouve le Champion, dit Gurda qui commençait à perdre patience devant cette échange en sylvain.
- Nous devons nous rendre dans l'antre des araignées, indiqua Aldéir à Olmith après avoir fait signe à Gurda.
- Je peux vous mener là bas mais je ne saurai que trop vous conseiller d'abandonner vos projets. C'est l'un des endroits les plus dangereux de la région. Vous risquez fort d'y trouver la mort.
- Je crains que notre décision ne soit prise, ami eladrin. Mais je vous remercie pour vos conseils et vos avertissements.
- Si je ne puis vous faire changer d'avis, je peux au moins vous y conduire par un chemin sûr. En revanche, je ne vous accompagnerai pas plus loin dans votre périlleux voyage.
- Nous vous sommes déjà infiniment reconnaissant de nous y conduire.
- Si tout est entendu, nous allons nous mettre en route alors. Suivez moi en silence et tâchez de rester dans la lumière. »
Olmith prit la tête du groupe et commença à marcher.
***