Ceci est mon journal et mon héritage.
J'espère que ces pages me survivront et permettront à d'autres que moi de continuer le combat. Quelle que soit votre origine, lorsque le Mal se réveille et abat son impitoyable oppression sur les villages, sur les peuples, sur le Monde, il faut trouver le courage de se lever et de se mettre en travers de son chemin.
Je n'étais qu'un enfant ordinaire, aussi peu que je m'en souvienne. Je n'ai jamais connu mon père elfe et ma mère est morte en me mettant en monde.
J'ai été élevé simplement par mes grands-parents dans un petit village de fermiers et, bien que mes souvenirs de cette époque soient flous, rien ne me destinait à autre chose que de reprendre la ferme ou travailler dans les champs.
Jusqu'à ce que le Mal, le plus grand Mal, apparaisse et massacre impitoyablement tous les hommes, les femmes et les bêtes du village.
Ce mal, c'est la Légion Obscure et ce journal a pour vocation de donner à tous ceux qui liront ces pages des moyens de combattre cette horrible engeance.
Afin d'être totalement honnête sur le sujet, je me dois tout d'abord d'écrire quelques lignes sur moi, afin que vous puissiez comprendre qui j'étais.
Je n'ai que peu éléments de mon enfance, tant en termes de souvenirs et de dates. Et mon origine elfique me faisant vieillir différemment des hommes, il m'est encore difficile aujourd'hui de placer un point précis sur l'époque de mon enfance.
Je me souviens des champs de blés, du travail physique à la ferme et dans le village. Mes grands-parents étaient des personnes aimantes et les villageois ne m'ont jamais exclu pour mon origine demi-humaine. Tout n'était pas idyllique bien sûr, la vie était difficile, mais le fait que tout le monde ait été massacré sous mes yeux par la Légion Obscure a certainement un peu altéré les souvenirs qu'il me reste.
Ce Mal doit être combattu par tous les moyens. Cette horde de démons et de créatures monstrueuses apparait sans que l'on ait encore compris comment et détruit toute vie.
Dans les villages qu'ils attaquent il ne laissent qu'une ville fantôme, méconnaissable, comme si le temps avait passé. Les quelques cadavres qui restent son mutilé et en état de décomposition avancé. Mais c'est uniquement pour les quelques cadavres qui sont encore car, la plupart du temps, il n'y a rien. Plus rien.
Ils ont détruit votre existence même. Vos parents, vos amis, vos frères, vos sœurs, votre aimée, vos enfants, le village où vous avez grandi...il n'y a plus rien. Rien qui ne subsiste, rien qui ne traversa les âges pour conter ce qui a pu se passer.
Pour une raison que j'ignore à ce jour, la Légion ne m'a pas tué et m'a enrôlé. Ces démons font ce genre de choses. Ils m’ont entrainé, affuté, torturé aussi bien physiquement que psychologiquement. Toute cette période a été complétement effacée de ma mémoire et les seuls flashs que j'en ai sont dans les cauchemars qui m’assaillent encore durant certaines nuits.
Je ne sais pas combien de temps cette captivité a duré, mais je sais que j'ai participé à des actions épouvantables. Et pour cela, je ne sais pas si je dois être complément pardonné car dans mes fameux cauchemars, je prends du plaisir à verser le sang.
Ces démons féériques, buvant le sang, entourés de loups d'ombre, massacrant à tour de bras de leurs épées aussi noire que la nuit étaient tout autant mes geôliers que mes frères. Et je prenais autant de plaisir aux massacres et aux entraînements qu'aux tortures qu'ils m'infligeaient. Et chaque moment passé en leur présence faisait s'éveiller une voix en moi. Une petite voix qui me disait de lutter, de combattre, de venger ces hommes et ces femmes contre ce Mal. Par ma force de Volonté, je commençais à me libérer de leur emprise surnaturelle. Mais chaque once de gagnée, chaque pas effectué vers la Lumière était plus difficile à chaque fois. Mais je luttais, je peux vous l'assurer. En mon fort intérieur, je n’étais plus un esclave et je savais que j'arriverais à me libérer. Même si cela prendrait des années.
Puis, un jour, il est passé quelque chose de nouveau. J'ai vu un ange ailé, dans une armure de plaques rutilante, des ailes de plumes éclatante dans son dos et maniant une épée de lumière apparaître devant moi. J'ai suivi cette apparition céleste et après un temps et une fuite qui m'ont paru interminable, hors du temps et de l'espace, j'ai émergé dans une clairière verdoyante à côté d'un vieil homme qui arborait un large sourire sous son épaisse barbe blanche : Vesym.
J'ai passé 4 ans avec Vesym. Il m'a soigné, m'a appris à canaliser ma colère et a réparé mon esprit brisé. C'était un prêtre de la lumière qui vivait aux abords de plusieurs villages et qui mettaient son érudition et ses dons au service des plus pauvres, des plus nécessiteux, sans jamais rien demander en retour.
Il a tenté à de nombreuse reprise à m'initier aux préceptes de son Dieu, mais j'avoue ne jamais avoir compris sa Foi. Il a fait preuve d'une patience infinie avec moi car, lorsqu'il m'a récupéré, j'étais davantage une bête brisée qu'un demi-elfe. La peur et la violence régissait mes réactions et il a su trouver les mots et les gestes pour me calmer et canaliser mon énergie vers quelque chose de positif. Il m'a aidé, tout simplement, à revenir des ténèbres. Même si je les sens toujours en moi et que bien des personnes les ressentes en ma présence, j'ai appris à retrouver le chemin vers le Bien et à comprendre ma place dans ce monde.
L'une des habitudes qu'il m'a donné est d'écrire pour mettre sur le parchemin mes pensées les plus sombres, afin de me calmer et de réfléchir à mes mots, essayer d'avoir une vue synthétique des situations que je traversais. Et cette habitude m'est resté comme vous pouvez le constater et je ne peux que vous engager à faire de même pour partager avec d'autres vos expériences pour combattre le Mal.
Vesym n’était pas un homme de guerre, loin de là, mais son érudition et sa sagesse m'ont tout de même permis de devenir un meilleur combattant. Là encore, je vous engage à vous entrainer et à apprendre de ceux de bonne volonté lorsque vous trouvez de telles âmes. J'ai répété et répété les mouvements que m'ont appris la Légion et je les ai améliorés. Je suis devenu un combattant acceptable et j'ai réussi à faire résonner en moi cette voix qui m'a guidé vers la lumière. Pour Vesym il ne faisait nul doute que c'était son Dieu, pour moi je l'appelle la Volonté. Et, une fois de plus, je vous engage développer votre conviction, votre force de caractère et de mettre de côté vos états d'âme pour devenir meilleur et aussi implacable que vos ennemis, que le plus grand Mal. Si nous échouons, ils causeront la ruine sur le monde et, par conséquent, les gens souffriront. Nous devons mettre notre personne de côté, et je dirais peut-être même notre âme pour vaincre si besoin est. Si nous parvenons à sauver le monde, notre âme ne sera qu'un bien faible prix à payer au regard des gens qui seront sauvés et de ceux que nous aurons vengés.
Durant ma convalescence, je n'étais pas seul et cela m'a également aidé à franchir les étapes. Avec moi, il y avait un loup féérique, noir comme la nuit qui m'avait suivi : Syf. Comme moi, il était plein de haine et de peur puis, au fur et à mesure que je guérissais, il guérissait aussi, perdant sa robe noire de brume et de fumée pour un pelage blanc. Aujourd'hui encore, il est mon plus fidèle compagnon, un ami qui a vécu ce que j'ai vécu, qui me comprends et ne me juge pas. Notre lien est indéfectible et même s'il n'appartient pas à mon monde, il répond toujours à mon appel lorsque j'ai besoin de lui.
Syf est une exception et je ne vous engage pas à essayer de sauver les membres et bêtes de la Légion Obscure. N'ayez aucune pitié. Réservez là pour des ennemis ordinaires, mais pas pour eux. Cela vous couterait la vie.
Lorsque Vesym est mort paisiblement dans son sommeil, les villageois ont organisé une grande cérémonie. J'ai perdu un ami, un père et un mentor. Je ne serais jamais aussi bienveillant que lui et le monde perd une belle âme.
J'ai récupéré les affaires que Vesym avait mis de côté lorsqu'il m'a trouvé : une cotte de maille, un bouclier, une épée longue et un morceau d'étendard arraché. Rien de plus qu'un bout de tissu sale mais qui a pour moi une signification importante. Le vieil homme l'a utilisé la première fois pour me faire un bandage de fortune et il a tout autant mon sang que le sien, car je l'ai mordu alors qu'il tentait de m'aider. Je n’étais qu'une bête à l'époque et il a fait de moi un homme. Son Dieu, s'il existe vraiment, l'accueillera à ses côtés et il posera, je l'espère, un regard bienveillant sur moi et me pardonnera certaines actions que je sais que je commettrais. J'ai également gardé le symbole sacré du Dieu de Vesym, un soleil. Des fois, je ressent une étrange présence, une chaleur. D’aucuns diraient que c’est son Dieu mais je préfère croire qu’il s’agit de l’empreinte bienveillante de mon vieux maître que je perçois lorsque je focalise mon esprit sur cet objet qui était si important dans sa vie.
Comme il l'a fait, je mettrais mes dons aux services de ceux qui en ont besoin. Et je traquerais inlassablement la Légion et le Mal. Pas de pitié. Pas d'état âme. Le Bien doit triompher du Mal.
Et, par ce journal, j'espère que ce combat sera victorieux au-delà de ma simple existence.
Ardanon